»Tu n’auras pas peur » de Michel Moatti

Titre VF : Tu n’auras pas peur

Auteur : Michel Moatti

Editions : HC Editions, 2017.

Genre : Thriller

Prix meilleur roman francophone festival Polar de Cognac 2017.

 » L’enfer est vide, tous les démons sont ici.  »

Résumé :

 » Tout commence par la remontée d’un cadavre à demi-congelé, attaché à un fauteuil d’avion immergé dans un étang de Crystal Palace, au sud de Londres. Puis on découvre le corps d’une jeune femme défigurée dans un hôtel de Bournemouth. Son visage a été découpé au cutter et emporté. Sur les réseaux sociaux et les blogs, les indices et les rumeurs circulent, bien plus vite que les informations officielles délivrées par la police et les journaux. Un mortel jeu de piste s’organise, dirigé par un assassin sans scrupules qui reconstitue avec autant de rigueur que de férocité les scènes de crime les plus choquantes. Quelle énigme se cache derrière ces sinistres « natures mortes » ? Lynn Dunsday, une jeune web-reporter fragile, aux lisières du burn-out, et Trevor Sugden, un journaliste qui travaille « à l’ancienne », se lancent sur les traces du meurtrier, anticipant les avancées de Scotland Yard.  »

Mon avis :

Michel Moatti m’avait conquise avec Retour à Whitechapel, où la fille de la dernière victime de Jacques l’Éventreur menait l’enquête. Un livre particulièrement convaincant et maîtrisé dans lequel il nous donnait sa version de l’identité du fameux tueur à l’aide notamment de pages de notes et photos présentent dans le livre.

Malheureusement, avec son dernier né, cela ne s’est pas déroulé de la même manière. Le but de Moatti dans ce récit est de nous amener à réfléchir sur notre mode de consommation d’informations, à l’heure où une donnée est d’abord annoncée sur le net, avant d’être, parfois, même vérifiée. C’est à travers deux journalistes aux méthodes différentes que l’auteur nous entraîne sur les traces d’un tueur en série. Ce dernier met en scène des cadavres dans les postures identiques à celle de la mort de certaines célébrités. L’effet, est, pour moi, atténué, car l’on suit essentiellement les avancées des journalistes plus que l’enquête en elle-même, ce qui rend l’intrigue parfois longue et peu mouvementée. De plus les deux protagonistes reporters, même si leurs méthodes diffèrent légèrement, l’un écrit dans un journal imprimé en papier et l’autre poste ses piges courtes et incisives dans un journal virtuel, ont le même esprit déontologique. J’aurais aimé suivre un personnage, qui, lui, se fiche, complètement de la morale afin de faire évoluer le propos de l’auteur et de lui permettre d’avancer des exemples et contre-exemples.

Le meilleur argument, reste pour moi, la postface où l’auteur explique se qui l’a motivé pour écrire cette histoire. Le point de départ est un véritable fait divers… et nous voilà transporté au sein même de ce qu’il expose dans le récit. Irons-nous, nous aussi, nous renseigner sur cela, mue d’une curiosité malsaine somme toute humaine ?… Le lecteur s’interroge sur ce que doivent être les médias, mais également quelle limite peuvent-ils avoir : faut-il tout dire et dans quel but ? Informer ou faire acte de voyeurisme ? Toutes ces interrogations nous ramène à notre propre comportement et c’est en cela qu’il remplit son contrat : nous plonger au cœur même du système car nous sommes ce système et l’alimentons… Jusqu’où ?…

Tu n’auras pas peur développe, certes, un thème actuel, mais l’ensemble du récit reste trop lisse pour en faire un véritable roman psychologique ou à suspense.

20 réflexions sur “ »Tu n’auras pas peur » de Michel Moatti

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    • C’est un bon thriller qui traite d’un sujet d’actualité même si je reste mitigée sur certains aspects comme l’enquête et le fait que l’on suive uniquement les journalistes.

  2. En faisant de ses personnages principaux des journalistes, je pense que cet ouvrage pourrait m’intéresser. Dans ce métier, on est très souvent confronté à cette question : suis-je vraiment dans l’information ou le voyeurisme ? Les lecteurs raffolent des faits divers, par conséquent, ce type de sujet prend beaucoup de place dans les médias. On sait pertinemment que ça va faire du clic, même un petit fait divers. C’est triste, mais c’est la réalité. Et tant que journaliste, on peut vite se demander si on fait correctement son boulot. Si on ne va pas trop loin par moment…

    • Je pense que si tu es dans le métier ce livre pourrai fortement t’intéresser, t’interpeller, te remettre en question vis à vis de ton travail. Une lecture utile.
      J’aime ta manière de penser : en effet nous sommes dans un revirement totale vis à vis de l’information, notre manière de l’utiliser et de la consommer change complètement et dans ce cas  »consommé » est je crois le bon terme. Nous verrons jusqu’où cela nous mènera…

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  4. Je l’ai lu également et je l’ai adoré. C’est un roman qui bouleverse quand même et qui nous fait nous poser des questions. Quoi que l’on sache quand même que dans certains cas, les journalistes font plus de voyeurisme qu’autre chose. Je suis la première à râler devant ma télé et le journal télé en me disant que cela suffit. Parfois, je suis en overdose.
    Michel Moatti m’a conquise. Après, c’est clair qu’il est très différent de Retout à Whitechapel. Tu as lu Blackout Baby ? On retrouve Amelia Pritlowe et cela concerne un fait divers survenu à Londres durant la Seconde Guerre Mondiale. Encore un très bon roman de l’auteur 🙂

    • Il est vrai que l’on se pose des questions, que l’on remet en cause notre mode de consommation d’images et d’informations. Un beau sujet mais j’aurais aimé qu’il aille encore plus loin pour vraiment être conquise…
      Je n’ai pas encore lu Blackout Baby, mais il me tente énormément !

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